Commémoration du 10 mai 2014 à Amiens
Le samedi 10 mai 2014 à 10h00 le Club International Négritude, l'Union des Africains et les associations amiénoises étaient au Square Aimé Césaire d'Amiens dans le cadre de la Journée Nationale des Mémoires de la Traite Négrière, de l'Esclavage et de leurs Abolitions.
Merci à tous les participants !
Cette Mémoire qui est à sa 9ème Edition a été honorée par la présence - pour la PREMIERE FOIS - d'un Préfet de Région. Et c'est M. Jean-François CORDET, Préfet de la Région Picardie, Préfet de la Somme qui a conduit la cérémonie républicaine. Témoignage fort d'une mémoire assumée par l'État.
Nos élus nationaux et municipaux - la député Europe Écologie Les Verts Barbara POMPILI, la député Parti Socialiste Pascale BOISTARD, et l'Adjoint au Maire d'Amiens Clément STENGEL - ont sorti pour la circonstance les Echarpes Bleu-Blanc-Rouge, une autre première qui a marqué le public venu nombreux malgré le temps pluvieux.
En présence de:
- Frédéric BUREAU, Directeur de l'Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre - Somme, Agissant en qualité de Maître de Cérémonie
- Nathalie LAVALLARD, Maire Adjoint d'Amiens en charge de la vie associative et de la démocratie locale
- Pascal RIFFLART, Vice-président d'Amiens Métropole en charge des transports
- Pierre FERRAND, Directeur de l'Auberge de Jeunesse d'Amiens Friant les-4-Chênes
- Jean Claude ESTER, Directeur de la Maison de l'Egalité d'Amiens, Espace Dewailly
- Maryse LION-LEC, ancien Maire adjoint en charge de l'égalité et de la lutte contre les discriminations.
- Jacques EBOSSE, Président de SOS Racisme 80
- Cyrille OLOU, Membre de l'association l'Universalisme
- Jean Claude MANEBARD, Poète et vice-président du Club International Négritude
- Fidèle MAKISI et Effo NZINGA de l'Association Congo Amiens Solidarité (ACAS)
Tous nos remerciements à Georgette AYINGONE NGUEMA (Chez Georgy), à Natacha ONDO et à Karen MELOLE dont les talents culinaires ont permis la clôture de cette cérémonie de façon conviviale autour d'un apéritif-déjeuner.
Tous nos remerciements aussi à Marc Affunaly KPASSIRA (à la photographie), Christian YOULA (au transport), Suzanne MBATA (aux relations publiques), Marie Noëlle MAMBO (au service), Jacques MOUKAGNA et Josué MAVUEMBA WAMBA (à la logistique)
Et merci à TOUS LES PARTICIPANTS. Rendez-vous le 10 Mai 2015 pour l'ANNIVERSAIRE des 10 ANS de la Journée Nationale des Mémoires de la Traite Négrière, de l'Esclavage et de leurs Abolitions.
Landry MANDOUKOU
Président Club International Négritude (CIN)
Textes lus :
Aimé CESAIRE (1913 - 2008)
Texte lu par M. Cyrille OLOU, membre de l’association L’UNIVERSALISME
[…] Le 27 avril 1848, un peuple qui depuis des siècles piétinait sur les degrés de l’ombre, un peuple que depuis des siècles le fouet maintenait dans les fosses de l’histoire, un peuple torturé depuis des siècles, un peuple humilié depuis des siècles, un peuple à qui on avait volé son pays, ses dieux, sa culture, un peuple à qui ses bourreaux tentaient de ravir jusqu’au nom d’homme, ce peuple là, le 27 avril 1848, par la grâce de Victor SCHOELCHER et la volonté du peuple français, rompait ses chaînes et au prometteur soleil d’un printemps inouï, faisait irruption sur la grande scène du monde.
Et voici la merveille, ce qu’on leur offrait à ces hommes montés de l’abîme ce n’était pas une liberté diminuée ; ce n’était pas un droit parcellaire ; on ne leur offrait pas de stage ; on ne les mettait pas en observation, on leur disait : « Mes amis il y a depuis trop longtemps une place vide aux assises de l’humanité. C’est la vôtre ».
Et du premier coup, on nous offrait toute la liberté, tous les droits, tous les devoirs, toute la lumière. Eh bien la voilà, l’œuvre de Victor SCHOELCHER. L’œuvre de SCHOELCHER, ce sont des milliers d’hommes noirs se précipitant aux écoles, se précipitant aux urnes, se précipitant aux champs de bataille, ce sont des milliers d’hommes noirs accourant partout où la bataille est de l’homme OU de la pensée et montrant, afin que nul n’en ignore, que ni l’intelligence ni le courage ni l’honneur ne sont le monopole d’une race élue […]
Aimé Césaire, extrait du discours prononcé le 21 juillet 1945 à l’occasion de la fête traditionnelle dite de Victor SCHOELCHER, publié dans « Victor SCHOELCHER et l’abolition de l’esclavage » (2004).
FRANTZ FANON (1925 - 1961)
Texte lu par M. Jean Claude MANEBARD, Poète, Vice-président du Club International Négritude
Je suis nègre. Et des tonnes de chaînes, des orages de coups, des fleuves de crachats ruissellent sur mes épaules.
Mais je n’ai pas le droit de me laisser ancrer.
Je n’ai pas le droit d’admettre la moindre parcelle d’être dans mon existence.
Je n’ai pas le droit de me laisser engluer par les déterminations du passé.
Je ne suis pas esclave de l’Esclavage qui déshumanisa mes pères.
Il ne faut pas essayer de fixer l’homme puisque son destin est d’être lâché.
La densité de l’Histoire ne détermine aucun de mes actes.
Je suis mon propre fondement.
Et c’est en dépassant la donnée historique, instrumentale, que j’introduis le cycle de ma liberté.
Le malheur de l’homme de couleur est d’avoir été esclavagisé.
Le malheur ET l’inhumanité du Blanc sont d’avoir tué l’homme quelque part.
[…]
Moi l’homme de couleur je ne veux qu’une chose : Que jamais l’instrument ne domine l’homme. Que cesse à jamais l’asservissement de l’homme par l’homme. C’est-à-dire de moi par un autre. Qu’il me soit permis de découvrir et de vouloir l’homme où qu’il se trouve.
Le nègre n’est pas. Pas plus que le blanc.
Tous deux ont à s’écarter des voies inhumaines qui furent celles de leurs ancêtres respectifs afin que naisse une authentique communication. Avant de s’engager dans la voie positive il y a pour la liberté un effort de désaliénation […]
Frantz Fanon, Peau noire, masque blanc (1952)
Texte lu en présence de Lionel JOSPIN, premier ministre, le 29 mai 2001, pour célébrer le vote de la loi du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité.
Léon GONTRAN-DAMAS (1912 - 1978)
Texte lu par M. Jean-François CORDET, Préfet de la Région Picardie, Préfet de la Somme
Il est des nuits sans nom
il est des nuits sans lune
où jusqu’à l’asphyxie
moite
me prend
l’âcre odeur de sang
jaillissant
de toute trompette bouchée
Des nuits sans nom
des nuits sans lune
la peine qui m’habite
m’oppresse
la peine qui m’habite
m’étouffe
Nuits sans nom
nuits sans lune
où j’aurais voulu
pouvoir ne plus douter
tant m’obsède d’écœurement
un besoin d’évasion
Sans nom
sans lune
sans lune
sans nom
nuits sans lune
sans nom sans nom
où le dégoût s’ancre en moi
aussi profondément qu’un beau poignard malais.
Léon Gontran-Damas, Pigments, Paris,
Les Editions Présence Africaine, 1937 (Ouvrage interdit en 1939).
Les Editions Présence Africaine, 1937 (Ouvrage interdit en 1939).